Le peuple, pourtant titulaire de la souveraineté, est trop souvent oublié. Et il est oublié parce qu’il effraie.
En effet, la classe politique n’a plus confiance dans le peuple, se limitant à le solliciter lors des élections. Les referenda britannique (Brexit) et italien (révision constitutionnelle), ou la victoire de Donald Trump aux États-Unis ne vont certainement pas lui permettre de rétablir ce lien.
Pourtant, toute élection présidentielle véhicule son lot de propositions pour faire évoluer les institutions, notamment en renforçant la place du peuple. Et celle de 2017 ne déroge certainement pas à la règle. Mais cette règle n’est complète que si on y ajoute l’adage « sitôt candidat, sitôt formulées ; sitôt élu, sitôt oubliées » : le nombre de propositions effectivement adoptées, après l’élection, est inversement proportionnel au nombre de propositions formulées, avant.
On dénonce alors l’absence d’accord entre les deux chambres du Parlement, indispensable à une révision constitutionnelle, le manque de consensus entre la majorité et l’opposition, nécessaire à une ratification par le Congrès, ou encore le besoin de satisfaire d’autres priorités, avant de s’attaquer à la tâche constitutionnelle.
La cause est bien plus profonde, la raison bien plus grave. Le peuple fait peur et il vaut mieux éviter de lui donner trop de pouvoir.
À quoi servent les primaires organisées par les partis politiques ?
Élection avant l’élection pour certains, stigmatisation des déchirures internes à un parti ou un courant politique, pour d’autres, bon nombre de ceux qui les critiquent en dénoncent l’absence d’intérêt, voire le caractère contreproductif. Les débats télévisés entre les candidats à la primaire de la Gauche de la semaine dernière n’auraient que confirmé ces réserves, en exposant les faibles différences qu’il y a entre eux, tout en livrant un jeu orchestré par des journalistes soucieux de l’audience et non de l’approfondissement des sujets.
C’est oublier l’objectif des primaires.
Celui-ci est double, en réalité : détacher la désignation d’un candidat de l’appareil du parti, créer un rassemblement.
Au préalable, soulignons que les partis politiques sont indispensables à une démocratie car ils permettent de la structurer : structurer l’offre politique proposée aux électeurs, structurer l’accès aux fonctions politiques des élus. C’est grâce à l’affiliation partisane que l’électeur peut mieux identifier l’orientation politique des candidats qui se présentent devant lui. En retour, c’est grâce à ce rôle exercé par les partis que ceux qui souhaitent exercer des fonctions électives peuvent y parvenir.
À tous ceux qui me font l’honneur et le plaisir de lire La Constitution décodée, je souhaite une excellente année 2017 !
L’argument justifiant l’introduction de proportionnelle pour l’élection des députés, au prétexte que le scrutin majoritaire ne reproduit pas fidèlement l’expression populaire, est fallacieux.
Si le Parlement est un représentant, il est aussi un pouvoir et un contre-pouvoir, en faisant la loi et en contrôlant le Gouvernement. Un Parlement démocratique n’est donc pas seulement celui qui représente la Nation ou le peuple, mais aussi celui qui est à même de légiférer et de contrôler, au nom du peuple. Il faut alors trouver un bon équilibre entre la représentativité et la capacité à prendre des décisions et mener des missions.
C’est alors que l’on s’offusque : pourtant censé représenter la Nation, le Parlement français ne représente pas toute la Nation. Le mode de scrutin retenu pour l’élection des députés à l’Assemblée nationale écarterait de la représentation nationale certaines formations politiques ou réduirait leur représentativité.
Une Constitution est faite pour durer, ce qui n’empêche pas qu’elle puisse être révisée. Toutefois, s’il est parfois nécessaire de la faire évoluer, on ne saurait en altérer les fondements.
Ainsi que l’a exposé Guy Carcassonne, la Constitution de « la Vème République a fait de la France une démocratie moderne, mais elle peut toujours gagner en démocratie et en modernité ». Ajoutons que l’objectif, en 1958, était de rationaliser effectivement le régime parlementaire, afin d’assurer une stabilité politique et institutionnelle. Pour cela, différents mécanismes ont été prévus (rôle du Président de la République, création du Conseil constitutionnel, encadrement du Parlement, etc.).