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Innover pour réviser : pour la création d’une commission constitutionnelle paritaire

Au menu du quinquennat, il y aura une révision constitutionnelle : le candidat Macron l’avait promis dans sa campagne, le Président de la République l’a confirmé, devant le Congrès. Elle sera au moins élaborée, sans doute discutée, peut-être adoptée.

Car, rappelons-le, pour voir le jour, une révision constitutionnelle suppose trois phases : celles de l’initiative, de l’adoption et de la ratification. La première appartient au Président ou aux parlementaires. La deuxième relève exclusivement des deux assemblées. La troisième passe par le Congrès ou le peuple, par referendum.

Si, en annonçant une évolution de la Constitution, le Président succombe à la même tentation que tous ses prédécesseurs, il évite la « comitonite », maladie répandue depuis le second mandat de François Mitterrand. Elle consiste à confier à un comité d’experts (et, parfois, de politiques) le soin de formuler des propositions en matière constitutionnelle ou institutionnelle. Mitterrand l’avait demandé à Georges Vedel, Jacques Chirac à Pierre Avril, Nicolas Sarkozy à Édouard Balladur et François Hollande à Lionel Jospin.
 
Qu’on le précise : ces comités ou autres commissions formulent, tous, des idées intéressantes et de grande qualité. Il ne s’agit pas de remettre en cause le résultat de leurs travaux.

En revanche, à répétition, rien de bon : moins qu’une coutume, ces comités sont devenus une forme de tradition. Et il faut y mettre un terme car le message ainsi renvoyé est généralement mal perçu par ceux auxquels il s’adresse et qui doivent adopter la réforme : les parlementaires. À juste titre, ils n’apprécient pas de voir leur travail effectué par d’autres, qui plus est par des experts qui, s’ils connaissent généralement bien la chose constitutionnelle, ne sont pas là pour décider comment la norme fondamentale doit être révisée, au nom du peuple.

Cette fois, le Président de la République a demandé aux seuls Garde des Sceaux, ministres responsables et présidents des assemblées de lui formuler des propositions. Sage décision, qui mériterait d’être développée.

Si seuls les parlementaires doivent adopter la révision constitutionnelle, autant les associer au processus le plus tôt possible. Cela renforce la recherche du consensus, indispensable à toute réforme de la norme fondamentale.

Il est indispensable, d’abord, parce que, fondamentale, la modification de la Constitution ne saurait être dictée par un seul courant politique, a fortiori par une seule personnalité. Ensuite parce que, précisément afin d’éviter cela, la procédure de révision impose de dépasser les clivages, d’une part entre les assemblées et, d’autre part, entre majorité et opposition. Les deux assemblées doivent ainsi se mettre d’accord sur un même texte, lequel, s’il n’est pas soumis à referendum, doit être ratifié à la majorité des trois cinquièmes par le Congrès.

Pour cela, les parlementaires de tous bords et des deux chambres pourraient être associés à la préparation du projet de révision. Ce serait purement informel, mais incontestablement efficace. Et le Président de la République l’a dit également : il recherche l’efficacité, en privilégiant le résultat sur la rapidité.

C’est pourquoi une « commission constitutionnelle paritaire » pourrait être créée, placée sous la triple présidence du Président du Sénat, du Président de l’Assemblée nationale et de la Garde des Sceaux et composée d’autant de députés et de sénateurs, représentant l’ensemble des groupes politiques des deux chambres. Cette commission s’occuperait de la préparation d’un texte sur lequel, a minima, ses membres s’accorderaient et qui serait ensuite soumis à l’arbitrage interministériel puis à la discussion des deux assemblées. Puisqu’il aura acquis le soutien de certains de leurs membres, issus des diverses formations politiques, il pourra plus aisément recueillir celui de leurs collègues, les premiers se chargeant de convaincre les seconds.

Fréquemment utilisée à l’étranger (Allemagne, Italie), cette procédure serait inédite en France. Et ce serait là une bonne façon de démontrer, une nouvelle fois, une volonté d’innover et, « en même temps », une fidélité à l’esprit de la Constitution de la Vème République. Car cela ressemble, d’ailleurs, au Comité consultatif constitutionnel qui participa à l’élaboration de la Constitution de 1958.


Au terme de cette année politiquement chargée, riche en élections et en événements extraordinaires, il est temps, pour La Constitution décodée, de prendre un peu de repos. Merci à vous tous de votre fidélité et rendez-vous à la rentrée, afin de poursuivre le décodage de l’actualité constitutionnelle, politique et parlementaire ! 
Le prochain billet paraîtra le 25 septembre 2017.

Bonnes vacances !

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