Seule la perspective de l’élection devrait faire les résultats des sondages et, pourtant, ce sont les sondages qui peuvent déterminer les résultats de l’élection en perspective.
Maudits sondages.
On n’a de cesse de les attendre, de les commenter, de les nuancer, de les critiquer voire de les dénoncer. Ils n’ont de cesse de se multiplier, d’alimenter les débats publics et privés, de générer du profit économique au point de devenir une industrie. Ils sont toujours là, comme d’indispensables repères de la vie politique, mais contribuent davantage à effacer ce que devraient être ces repères : les débats publics entre candidats.
La Présidentielle décodée se posait la question il y a quelques semaines : si, à chaque élection présidentielle, il y a eu une surprise, la surprise de l’élection de 2022 pourrait être qu’il n’y en ait pas. Mais il faut attendre les deux tours des 10 et 24 avril prochains pour le savoir et se livrer à une analyse de ce scrutin.
Cependant, à deux petites semaines du premier tour et alors que débute la campagne officielle, on peut est certain : le scrutin de 2022 est bien particulier, pour de multiples raisons.
En premier lieu, le Président sortant est candidat à sa propre succession. Ce n’est pas, en soi, extraordinaire mais n’oublions pas que ce ne fut pas le cas en 2017. Mais surtout, les sondages laissent entendre qu’il devrait l’emporter, ce qui est bien davantage exceptionnel. Ni Jacques Chirac en 2002, ni Nicolas Sarkozy en 2012 n’était donné vainqueur au second tour et, si le premier l’emporta malgré tout, c’était face à un adversaire que l’on n’attendait pas.
Une rumeur, savamment entretenue depuis quatre mois, plane entre le Palais de l’Élysée et le Palais Bourbon, sans avoir été noyée dans la Seine qui les sépare. Du moins pas encore.
L’Assemblée nationale pourrait être dissoute, afin de raccourcir le délai séparant le second tour de l’élection présidentielle du premier tour des élections législatives.
L’idée est possible et plausible, mais sa réalisation serait saugrenue, malvenue et très risquée. Pour le comprendre, il faut en cerner les causes, en identifier la faisabilité, avant d’en exposer les conséquences.
Pourquoi une telle dissolution ? Classiquement, depuis 1981 (et non depuis 2002, première application de la synchronisation des calendriers) et à la seule exception de 1995, les élections législatives ont lieu cinq semaines (quatre en 1988) après l’élection du Président de la République. L’explication en est que l’élection présidentielle se tient habituellement lors de l’avant-dernier dimanche d’avril et du premier dimanche de mai, tandis que les élections législatives ont généralement lieu le deuxième et le troisième dimanches de juin.
C’est déplorable mais c’est ainsi : les réseaux sociaux et, plus généralement, Internet échappent encore (trop) largement aux réglementations relatives aux campagnes électorales en général et à l’élection présidentielle en particulier.
La cause en est leur caractère évidemment récent : même s’ils sont désormais bien implantés dans nos vies quotidiennes, ils sont apparus bien plus récemment que les voies de communication « classiques », telles que la presse écrite, la radio et la télévision. Il faut ajouter à cela la difficulté d’en encadrer précisément l’usage, eu égard à de multiples facteurs : anonymat, absence de frontières, définition précise de ce qu’est un « réseau », etc.
À chaque élection présidentielle, on constate toutefois une utilisation et une influence grandissantes, voire exponentielles de ces réseaux, dont on serait d’ailleurs incapable de dresser une liste exhaustive (faudrait-il, par exemple, y inclure des canaux de communication tels que les messageries instantanées, comme WhatsApp, Telegram, Signal, etc. ?).