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Aux mêmes causes, les mêmes effets
Ce billet est initialement paru sous forme de chronique dans « Un œil sur la Constitution », in Nouvel Obs, le 26 septembre
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Aux mêmes causes, les mêmes effets : à peine six mois après la condamnation de Marine Le Pen et sa diatribe déversée contre les juges, Nicolas Sarkozy a fait l’objet d’une sentence historique, le conduisant à dénoncer une décision « d’une gravité extrême pour l’État de droit, pour la confiance qu’on peut avoir en la justice ».
Dans les deux cas, nous avons une personne condamnée en première instance à une peine relativement lourde, alors qu’elles clament leur innocence (tout en reconnaissant la matérialité des faits, dans le cas de Madame Le Pen). Cette condamnation est assortie de « l’exécution provisoire », c’est-à-dire qu’elle s’applique malgré l’appel. Voici pour « les causes ».
Dans les deux cas, loin de s’émouvoir d’une peine excessive ou disproportionnée, loin de dénoncer un droit pénal trop rigoureux qui ne leur aurait pas permis de faire valoir leur – prétendue – innocence, les deux condamnés s’en prennent aux fondements mêmes de notre démocratie. Ils dénoncent un gouvernement des juges, une justice, voire des juges partiaux, une atteinte à l’État de droit. Voici pour « les effets ».
Privilégier l’intérêt national sur les intérêts personnels
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Péché d’orgueil. François Bayrou, fidèle de la foi chrétienne, savait pourtant qu’il s’agit d’un péché capital… il y a néanmoins succombé. Doté d’un talent d’écoute, d’une capacité de dialogue, de plus de quarante années d’expérience politique et libéré de l’ascendance élyséenne en ayant réussi à s’imposer contre la volonté du Président de la République tout en ayant contribué à son arrivée à l’Élysée, en 2017, François Bayrou a cru que ce seul bagage serait suffisant et qu’il n’avait pas besoin de dialoguer avec les forces politiques pour emporter leur confiance… Cette vanité lui fut fatale.
Budget : une crise politique, pas de régime
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Le verdict approche. En dégainant l'article 49, al. 1, François Bayrou tente de trouver une issue de secours, aussi bien personnelle que politique. S'il est désavoué, scénario le plus probable, son gouvernement tombera.
Crise politique ou crise de régime ? Nous avons demandé leurs regards au spécialiste de droit constitutionnel Jean-Philippe Derosier. Pour lui, qu'elle menace ou non nos institutions, la crise est sérieuse.
Et la marge de manœuvre d'Emmanuel Macron se réduit. Une nouvelle dissolution se profile, où planent déjà les petits calculs et les stratégies de boutique. Le RN, en embuscade, pourrait en sortir vainqueur.
Propos recueillis par Christophe Barbier.
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Comment décryptez-vous la décision du Premier ministre : engager la responsabilité du gouvernement ?
François Bayrou a voulu lancer un défi : « C’est moi ou le chaos. Soit vous me faites confiance et nous négocions entre forces politiques responsables, soit c’est le chaos car personne d’autre ne sera en mesure de faire mieux, donc il y aura dissolution. L’extrême-droite gagnera du terrain tout en perdant sa députée phare qu’est Marine Le Pen, tous les autres seront affaiblis. Et tout cela dans un moment où l’on est confronté à des crises économique et diplomatique mondiales. » Je pensais qu’il attendrait la rentrée parlementaire, mais il a d’évidence voulu précéder le 10 septembre. D’un côté, quinze jours de plus n’auraient pas été inutiles pour négocier ; de l’autre, si le 10 avait été un succès, cela rendait les choses plus difficiles.
Le pari de François Bayrou : « moi ou le chaos »
Ce billet est initialement paru sous forme de chronique dans « Un œil sur la Constitution », in Nouvel Obs, le 27 août
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Prenant de court tant le mouvement « Bloquons tout » du 10 septembre que La France insoumise et la motion de censure qu’elle entendait déposer à l’ouverture de la session extraordinaire, François Bayrou a décidé de solliciter la confiance des députés, le 8 septembre prochain.
Ce mécanisme se distingue de la motion de censure, dont avait l’objet Michel Barnier, le 4 décembre dernier. Le premier est « descendant », à l’initiative du Premier ministre qui sollicite les députés, tandis que le second est « ascendant », à partir de députés qui mettent en cause le Gouvernement et décident de le renvoyer. De plus, pour qu’une motion de censure soit adoptée, il faut qu’une majorité absolue des députés composant l’Assemblée nationale la vote, sachant que seuls sont comptabilisés les votes qui lui sont favorables : s’abstenir revient à voter contre. Au contraire, la confiance est accordée à la majorité des suffrages exprimés et les députés ont donc trois options : voter pour la confiance, voter contre ou s’abstenir.
C’est pourquoi « ne pas accorder la confiance », c’est-à-dire ne pas voter « pour » et « voter contre la confiance » ne sont pas équivalents.
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