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Vous avez dit « CMP » ? Ce qui s’y joue et ce qu’on peut en attendre
Ce billet est initialement paru sous forme de chronique dans « Un œil sur la Constitution », in Nouvel Obs
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Depuis ce jeudi 30 janvier au matin, députés et sénateurs se réunissent dans une « commission mixte paritaire », CMP, pour tenter de trouver un accord sur le budget pour 2025. Véritable lieu de la concertation parlementaire, où peuvent se forger des compromis, cette commission est cruciale dans la procédure parlementaire et budgétaire.
Pourtant, elle pourrait être bien moins utile qu’il n’y paraît.
Comme son nom l’indique, elle est mixte et paritaire : elle associe des députés et des sénateurs (« mixte »), en nombre égal (« paritaire »), à savoir sept titulaires issus de chaque assemblée (quatorze au total), auxquels s’ajoutent autant de suppléants. Ces derniers peuvent participer aux débats, mais ne peuvent pas voter (sauf défection du titulaire). Sa composition est déterminée à chaque texte, en fonction des spécialités des parlementaires et selon une répartition par groupe qui est arrêtée, quant à elle, pour l’ensemble des CMP.
Vote de la censure par l’extrême droite : rien à gagner et beaucoup à perdre
Ce billet est initialement paru sous forme de chronique dans « Un œil sur la Constitution », in Nouvel Obs.
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Le Gouvernement de Michel Barnier vivrait ses dernières heures. Empêtré dans la procédure budgétaire, il a en effet été contraint d’activer le « 49, al. 3 », conduisant au dépôt d’une motion de censure par le Nouveau Front populaire (NFP). Elle pourrait être également votée par l’extrême droite conduisant à son adoption par une majorité absolue de députés (289) et contraignant le Gouvernement à la démission.
Cette chute pourrait donc intervenir dès mercredi, lors de l’examen du budget de la sécurité sociale. Si tel n’était pas le cas, ce serait d’ici à la fin de l’année, lors de l’examen final du budget de l’État. Tout cela est au conditionnel car rien n’assure, à ce stade, que la motion de censure sera adoptée. On relèvera simplement que Marine Le Pen et ses alliés ont peu à gagner mais beaucoup à perdre à s’allier à la gauche pour voter la censure.
Le Pen à la peine
« Soutenez Marine ! Défendez la démocratie ! »
Telle est la pétition lancée par l’extrême droite pour venir au secours de Marine Le Pen, que des faits accablants promettent à une condamnation probable.
Fréquemment, le tribunal de l’opinion condamne avant même que le tribunal judiciaire ne puisse se prononcer. Voici qu’aujourd’hui, alors que le tribunal correctionnel remplit son office, comme la loi l’y oblige, l’opinion est appelée à la rescousse : il y aurait scandale démocratique, car un procureur a demandé l’application de la loi à l’égard d’une candidate putative de la prochaine élection présidentielle, par ailleurs deux fois qualifiée au second tour des deux précédents scrutins.
Budget et Constitution
Ce billet est initialement paru sous forme de chronique dans « Un œil sur la Constitution », in Nouvel Obs
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Fait exceptionnel, presque qualifiable d’inédit : l’Assemblée nationale a rejeté, par 362 voix contre 192, la première partie du projet de loi de finances pour l’année 2025. Ce rejet emporte celui de l’ensemble du projet de loi, qui poursuit ainsi le cheminement de la procédure législative en étant transmis au Sénat, dans sa version initiale, c’est-à-dire tel qu’il avait été déposé sur le bureau de l’Assemblée, sans aucun des amendements qui ont été adoptés. Resituons brièvement le contexte, avant de livrer quelques éléments d’analyse.
La loi de finances est composée de deux parties : la première détermine les recettes et la seconde est relative aux dépenses. Un vote doit avoir lieu sur chacune d’entre elles et il n’est pas possible d’examiner la seconde tant que la première n’est pas adoptée. La raison paraît évidente : si on n’acte pas « d’entrées » dans les caisses de l’État (les « recettes »), il n’est pas possible d’engager « des sorties » (les dépenses). Ce principe a pourtant dû être affirmé par le Conseil constitutionnel puisqu’en 1979, un cas similaire s’était produit : l’Assemblée nationale n’avait pas rejeté l’ensemble de la première partie (à l’époque, un tel vote n’existait pas), mais l’article dit « d’équilibre », soit celui qui détermine, en fin de première partie, l’état des recettes escomptées et qui doit ainsi fixer un plafond des dépenses. En rejetant cet article, c’était en réalité l’ensemble des recettes qui était remis en cause. Malgré cela, à l’époque, l’Assemblée avait poursuivi l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances. Dans sa décision du 24 décembre 1979, le Conseil avait censuré l’intégralité du budget.