Aux urnes citoyens



Réflexions sur quelques aménagements du vote à l’urne

NB : Cet article, inédit, complète et poursuit le débat engagé dans le dossier « Crise du vote… vote de crise ? » (Cité, n° 1, février 2022). Il fera l’objet d’une publication dans le prochain numéro de notre revue.

Mieux vaut un vote à l’urne qu’un aménagement du vote, mais mieux vaut un aménagement du vote que pas de vote du tout.

Depuis le début des années 1990, le taux de participation aux élections municipales chute régulièrement, d’environ deux points à chaque scrutin, pour atteindre 63,55 % au premier tour et 62,13 % au second, en 2014. Il s’agit pourtant du scrutin le plus mobilisateur, après l’élection présidentielle. La participation aux élections régionales et départementales est plus irrégulière, oscillant entre 69 % et 50 % de 1992 à 2015, la tendance étant toutefois globalement baissière. Il en est de même pour les élections législatives ou l’élection présidentielle, où le taux n’a de cesse de baisser (sauf le rebond de 2007 pour cette dernière, en raison de l’arrivée de l’extrême droite au second tour, pour la première fois, au scrutin précédent). Ce taux passe sous les 50% pour les élections législatives de 2017 (48,70% au premier tour et 42,64 % au second) : du jamais vu.

La chute est vertigineuse en 2020 et en 2021. Lors des élections municipales de 2020, seuls 44,66 % des électeurs se sont rendus aux urnes le 15 mars, jour du premier tour, tandis que 41,6 % des électeurs seulement se déplacent le 28 juin, pour le second tour. Les causes majeures résident dans les annonces préalables au premier tour : le jeudi 12 mars, le Président de la République annonce la fermeture des écoles, à compter du lundi suivant mais maintient les élections ; puis, le samedi 14, veille du scrutin, le Premier ministre annonce que « tous les lieux recevant du public non indispensables à la vie du pays, […] notamment restaurants, cafés, cinémas, discothèques » seraient fermés le soir même, mais les élections municipales sont toujours maintenues. L’incidence est réelle, directe et immédiate sur le comportement électoral. C’est d’ailleurs cette seule annonce, couplée au taux de participation qui a conduit le tribunal administratif de Nantes à annuler le scrutin municipal de la ville de Malville, au regard des trois voix d’avance qui ont permis à un candidat de remporter l’élection.

S’agissant du second tour, dont la tenue le 28 juin a été longtemps incertaine et suspendue aux avis du comité scientifique (convocation des électeurs annoncée par le Premier ministre le 22 mai après le feu vert du conseil scientifique, sauf si une dégradation des indicateurs devait apparaître ; amélioration de la situation épidémique les 8 et 14 juin, date à laquelle le Président de la République a confirmé la tenue du scrutin, qui a encore été suspendue à la décision du Conseil constitutionnel du 17 juin). La campagne s’est déroulée dans le contexte anxiogène de sortie du confinement du printemps, encadrée par des restrictions (réunions, rassemblements) importantes.

Les électeurs ont eu peur, ils ne se sont pas déplacés.

Il est probable que le vote à distance, s’il avait existé, aurait pu avoir un impact, dans ces circonstances très particulières, pour les électeurs qui ne sont pas traditionnellement abstentionnistes mais qui, dans un contexte épidémique menaçant, ne souhaitent pas prendre le risque de se rendre au bureau de vote. On pense naturellement aux personnes les plus fragiles, comme les personnes âgées qui, en outre, ont connu le vote par correspondance, avant sa suppression en 1975.

Ces épisodes invitent à une réflexion sur les aménagements possibles du vote à l’urne, entre des promesses qui ont pu être faites (I) et le mirage qu’elles entretiennent (II).

Retrouvez l'intégralité de cet article en ligne dans la Revue Cité (n°1 février 2022) et paraitra dans la revue papier du mois de septembre.
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